L'Abbaye de Valloires
Entourée de bois, vergers et jardins, sur la pente douce d'un côteau de la vallée de l'Authie, l'abbaye de Valloires est le plus parfait exemple d'architecture 18e en France.
Guy II, comte de Ponthieu, appelle les moines de Cîteaux qui s'installent à Valloires en 1158. Forêts à défricher, poissons de rivière et d'étang permettent une grande prospérité. L’église du 13e s. devient lieu de sépulture des Ponthieu.
1346, Bataille de Crécy, les moines se réfugient à Abbeville et Montreuil. Anglais et Bourguignons au XVe s, Espagnols et Huguenots au XVle, Impériaux au XVlle se succèdent dans le pillage de l’abbaye. Décadence spirituelle et morale.
Plusieurs incendies ravagent le monastère. L'abbé Martineau le restaure en 1647, mais les réparations sont faites à la hâte, le clocher s'effondre. Grâce à la vente d'une importante coupe de bois, la reconstruction intégrale est entreprise de 1741 à 1756 sous l'égide de Mgr d'Orléans de la Motte, évêque d’Amiens et abbé commendataire, sur les plans de l'architecte Coigniart et sous l’autorité du maître-maçon Collet. La décoration est l'œuvre du baron Simon-Georg von Pfaffenhofen, "Pfaff" (1715-1784), officier autrichien réfugié en France à la suite d’un duel, sculpteur de premier plan. Valloires est son chef-d'œuvre. Boiseries fleuries, sculptures débordantes de vie, angelots... art exubérant d'Europe centrale, Bavière ou Tyrol.
Vendue comme bien national en 1791, sauvée du désastre de la Révolution par Jourdain de l'Eloge, seigneur d’Argoules, l'abbaye abrite en 1817 la confrérie des Basiliens, laïcs vivant en communauté chrétienne de leur travail manuel. 1880, la Société de Saint-Vincent-de-Paul en fait un orphelinat. 1906, le classement aux Monuments Historiques la sauve d'une vente "dispersion". Première Guerre mondiale, elle est transformée en hôpital militaire belge.
Aujourd'hui, les bâtiments, siège de l’Association de Valloires, abritent des activités du secteur social et médico-social en faveur des enfants et personnes âgées, des actions culturelles et hôtelières.
En février 1922, Mlle Thérèse Papillon, infirmière de la Croix Rouge Française, soeur de l'Abbé Papillon, visite l’abbaye et y installe un préventorium. L’Association de Valloires née ce 2 février 1922, reconnue d’utilité publique le 10 juin 1925, se donne comme but : "… lutter contre les fléaux sociaux de toute nature, par la création et la gestion de sections diverses : préventorium, centres culturels, sociaux, écoles ménagères, maison de retraite….Elle assume la responsabilité de l’entretien et de la sauvegarde des bâtiments et des sols, classés "Monuments Historiques", ainsi que de la gestion, sous quelque forme que ce soit, et de la mise en valeur du Domaine de Valloires…"
Cinq établissements et services, plus de 500 adhérents et 230 salariés. Elle anime et gère :
- une Maison d’Enfants à Caractère Social et un Institut Thérapeutique Éducatif et Pédagogique pour qu'ils retrouvent famille d’origine, d’accueil ou cursus scolaire.
- une Résidence d’Accueil Temporaire, 18 lits, aménagée dans l’ancienne grange à colombages des moines, en surplomb des jardins, pour lutter contre l’isolement des personnes dépendantes et âgées en leur permettant de rester dans leur cadre de vie. La batisse conserve l'ancienne charpente et la grande roue qui servait à monter les récoltes.
- l’Association a créé un Service d’Aide et de Maintien à Domicile sur le canton de Rue.
L’abbaye accueille un grand nombre de visiteurs (25 000 en 2002, 35 000 en 2004).
Elle adhère à la Charte européenne des Abbayes et Sites Cisterciens.
Association de Valloires - 80120 Argoules - Tél : + 33 3 22 29 62 33 (visites, hôtellerie) ou + 33 3 22 29 62 08 (siège social) Fax : + 33 3 22 29 62 70
E-mail : asso.valloires@wanadoo.fr
Dans la vaste cour d'honneur en fer à cheval, parterres à la française, à gauche, colombier du 17e, en face, long bâtiment au grand toit d’ardoise, dissimulé sous une abondante végétation, que prolonge, à droite, le logis abbatial. Bâtiments mansardés, construction en brique très sobre, frontons latéraux et encadrements des fenêtres en pierre.
Le salon de réception, décoré d'élégantes boiseries et d’un magnifique lustre Louis XIV, montre deux toiles, portraits de l’abbé commendataire et du prieur, dom Antoine-Bernard Comeau.
Le cloître, très simple, est voûté d'arêtes en brique et pierre. Pilastres doriques.
Au rez-de-chaussée de l'aile est, la salle capitulaire voûtée, antérieure d'un siècle à la reconstruction. À l'étage, les appartements de l'abbé et les "cellules" des moines aux alcôves encadrées de boiseries sculptées.
L'église abbatiale, édifice en croix latine entièrement en craie locale, est un accord remarquable entre sobriété architecturale et élégance ornementale. Le buffet d'orgues est digne d'une cathédrale. Les arabesques de la haute grille qui sépare la nef du chœur sont d'un dessin qui ne fait pas obstacle au regard. Le chœur présente des guirlandes de roses sculptées dans le lambris des stalles, anges dorés qui s'agenouillent sur l'autel, d'autres voltigeant à la voûte retenant par un cordon le ciborium. Un ouvrage de ferronnerie domine l'autel, enchevêtrement végétal et rocaille, de Jean-Baptiste Veyren, "le Vivarais", auteur de celles qui ferment le choeur de la cathédrale d’Amiens.
La chapelle absidale, comme l’abbaye, est consacrée à la Vierge.
La sacristie, jouxtant l’abbatiale, est remarquable par ses boiseries, son parquet à la française et les quatre toiles de 1753 : Adoration des Bergers, Fuite en Egypte, Jésus et les Docteurs et le Jardin des Oliviers. Au-dessus de la porte, St Jérome au désert, de François Boucher.
Le petit enclos gazonné est le lieu de repos des Basiliens, 29 tombes alignées. Dans la cour attenante subsistent 2 arcades brisées du Xllle, seuls vestiges de l’église primitive.
Le temporel de l'abbaye recouvrait une fortune foncière importante répartie dans la région, Port-le-Grand, près d'Abbeville, Vron, Mézoutre, Crécy-en-Ponthieu, Petit-Chemin... donations des comtes de Ponthieu qui avaient fait figurer leurs armoiries dans le blason de l'abbaye "d'azur à trois bandes d'or, à la bordure de gueules".
Depuis quelques années, on y vient aussi pour la collection botanique. Le parc de 8 ha présente des végétaux en fonction des paramètres historiques et du site de l'abbaye : cloître végétal vis-à-vis des bâtiments, massifs en carré rappellant les jardins cisterciens, canal artificiel en mémoire du "riverel" qui traversait la cour du monastère. Plus de 4000 espèces et variétés, classées et ordonnées par apparentement esthétique, jardin à l’anglaise rassemblant une collection d’arbustes rares, jardin à la française avec des milliers de rosiers, jardin des cinq sens, jardin d’eau de 5000 m2.
La roseraie associe rosiers, plantes vivaces et simples disposés en carrés réguliers. 200 variétés anciennes. Le rosier "Jardin de Valloires" créé par André Eve ou la "Rose de Picardie" sont des créations modernes.
La création, le développement, l’exploitation des Jardins de l’abbaye, ont été confiés en 1987 au Syndicat Mixte d’Aménagement de la Côte Picarde (SMACOPI).
Ce paradis est unique en France.